"Veillez donc et priez en tout temps afin d'avoir la force d'échapper à tout ce qui doit arriver et de vous tenir debout devant le Fils de l'homme" (Lc 21,36).
Saint Luc, le même évangéliste, nous montre Jésus qui "leur disait une parabole sur ce qu'il leur fallait prier sans cesse et ne pas se décourager" (Lc 18,1-8). Prier sans cesse, prier en tout temps, ce conseil pressant, souvent transmis par Saint Paul ( 1 Th 5,15-18; Eph 6,18; Col 4,2...), a frappé nos premiers "pères" dans la foi.
Comment prier sans cesse ? ... si ce n'est en prenant conscience que nous sommes le temple du saint Esprit: "Ne savez-vous pas que vous êtes un temple de Dieu et que l'Esprit de Dieu habite en vous ?" (1Co 3,16) Mais, pour que ce temple de Dieu ne soit pas désaffecté et livré à tous les vents contraires, méditons quelques phrases de cette belle lettre des débuts du Christianisme:
"Les chrétiens ne se distinguent des autres hommes ni par le pays, ni
par le langage, ni par les coutumes. Car ils n’habitent pas de villes qui
leur soient propres, ils n’emploient pas quelque dialecte extraordinaire, leur
genre de vie n’a rien de singulier. Leur doctrine n’a pas été découverte par
l’imagination ou par les rêveries d’esprits inquiets; ils ne se font pas, comme
tant d’autres, les champions d’une doctrine d’origine humaine.
Ils habitent les cités grecques et les cités barbares suivant le destin
de chacun ; ils se conforment aux usages locaux pour les vêtements, la
nourriture et le reste de l’existence, tout en manifestant les lois
extraordinaires et vraiment paradoxales de leur manière de vivre. Ils
résident chacun dans sa propre patrie, mais comme des étrangers domiciliés. Ils s’acquittent de tous leurs devoirs de
citoyens, et supportent toutes les charges comme des étrangers. Toute terre
étrangère leur est une patrie, et toute patrie leur est une terre étrangère. Ils se marient comme tout le monde, ils ont
des enfants, mais ils n’abandonnent pas leurs nouveau-nés. Ils prennent
place à une table commune, mais qui n’est pas une table ordinaire.
Ils sont dans la chair, mais ils ne vivent pas selon la chair. Ils
passent leur vie sur la terre, mais ils sont citoyens du ciel. Ils
obéissent aux lois établies, et leur manière de vivre est plus parfaite que les
lois. Ils aiment tout le monde, et tout
le monde les persécute. On ne les connaît pas, mais on les condamne ; on les
tue et c’est ainsi qu’ils trouvent la vie. Ils sont pauvres et font beaucoup de
riches. Ils manquent de tout et ils tout en abondance. On les méprise et, dans
ce mépris, ils trouvent leur gloire. On
les calomnie, et ils y trouvent leur justification. On les insulte, et ils
bénissent. On les outrage, et ils honorent. Alors qu’ils font le bien, on
les punit comme des malfaiteurs. Tandis qu’on les châtie, ils se réjouissent
comme s’ils naissaient à la vie. Les Juifs leur font la guerre comme à des
étrangers, et les Grecs les persécutent ; ceux qui les détestent ne peuvent pas
dire la cause de leur hostilité.
En un mot, ce que l’âme est dans le corps, les chrétiens le sont dans
le monde. L’âme est répandue dans membres du corps comme les chrétiens dans les
cités du monde. L’âme habite dans le corps, et pourtant elle n’appartient pas
au corps, comme les chrétiens habitent dans le monde, mais n’appartiennent pas
au monde. L’âme invisible est retenue prisonnière dans le corps visible;
ainsi les chrétiens : on les voit vivre dans le monde, mais le culte qu’ils
rendent à Dieu demeure invisible. La chair déteste l’âme et lui fait la guerre,
sans que celle-ci lui ai fait de tort, mais parce qu’elle l’empêche de jouir
des plaisirs ; de même que le monde déteste les chrétiens, sans que ceux-ci lui
aient fait de tort, mais parce qu’ils s’opposent à ses plaisirs.
L’âme aime cette chair qui la
déteste, ainsi que ses membres, comme les chrétiens aiment ceux qui les
déteste. L’âme est enfermée dans le corps, mais c’est elle qui maintient le
corps; et les chrétiens sont comme détenus dans la prison du monde, mais c’est
eux qui maintiennent le monde. L’âme immortelle campe dans une tente mortelle:
ainsi les chrétiens campent-ils dans le monde corruptible, en attendant
l’incorruptibilité du ciel. L’âme devient meilleure en se mortifiant par la
faim et la soif; et les chrétiens,
persécutés, se multiplient de jour en jour. Le poste que Dieu leur a fixé est si beau qu’il ne leur est pas permis
de le déserter."
De la Lettre à Diognète, nn. 5-6
(Funk, 1, 317-321)
Soeur Anne-Marie
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire